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Sant Mac'hloù hag e vro
12 octobre 2019

Paou-Aled

Les évếchés et pays de Bretagne sont issus des pagi, sing. pagus, qui en langue bretonne ont donné les peier, sing. paou. Le pagus latin est issu de l'administration romaine, qui s'est peut-être calquée à des pays celtiques plus anciens. Les peier de Bretagne ont perduré près de deux mille ans jusqu'au XIXe siècle et la création des départements français.

Selon les normes romaines puis carolingiennes, le comte et son auxiliaire le vicomte avaient en principe pour ressort commun le pagus (pluriel pagi). Sur le plan ecclésiastique, le comte avait pour homologue l’évêque dont le diocèse devait correspondre aux limites du pagus. Rien de comparable en Bretagne: les pagi y ont bien existé, mais les évêchés en tant que territoires épousant ceux des pagi n'ont duré que pour l'Armorique romaine: Alet, Coutances, Lisieux, Rennes, Nantes, Vannes, Quimper. Certains seront repris par les patriarches venus des iles, mais sous d'autres molalités: quand les Bretons s'installent, on ne sait pas bien d'une part si ces territoires étaient encore d'actualité, dans un pays ayant souffert de nombreux troubles, d'autre part il ressort de cette période que les évêchés-monastères sans territoire font plus autorité, avec à leur tête de nombreuses personnalités britto-irlandaises qui essaiment ermitages et dépendances dans toute la zone occupée par les nouveaux arrivants de l'ile de Bretagne. Ce n'est qu'au VIIIe siècle, sous Nominoë, que des évéchés-territoires apparaissent de nouveau, avec à leur tête des cités-évéchés au nombre de sept, tandis que Rennes et Nantes n'ont pas bougé depuis la période romaine.

Pour ce qui est d'Alet (future Saint-Malo), son pagus s'étendait semble-t-il de Cancale à Morlaix, et sera repris par Riwall pour devenir le royaume de Domnonée. Selon la logique romaine, un nouvel évếché d'Alet aurait dû se conformer à ces limites, mais ç'aurait été sans compter l'autre logique des arrivants bretons: au temporel, le dernier comte d’Alet semble avoir disparu au Xe siècle, et avant lui l'intégralité de son territoire, qui se morcela en plusieurs seigneuries, tels le Penthièvre, le Porhoêt, le Poudouvre... suivant la répartition des familles bretonnes; au religieux, le carcan des anciennes paroisses gallo-romaines, ou ce qu'il en rest, s'efface devant  les fondations monastiques, en l'occurance le monastère de saint Malo, mais aussi ceux des saints Lunaire, Suliac, Méen, Armel, etc., et si saint Malo lui-même reçoit finalement la charge de l'évêché d'Alet, son lieu de vie est situé de l'autre côté de l'anse, qui devient un monastère et le véritable centre de la vie religieuse du pays.

L'évêché d'Alet lui-même est supplanté par celui de Dol, qui est celui du royaume de Domnonée et qui s'étendra jusqu'à Brest, le Léon y ayant été rattaché. Puis, sous Nominoë, la Domnonée est répartie en cinq évếchés: Saint-Pol, Tréguier, Saint-Brieuc, Alet-Saint-Malo, Dol, en même temps que Dol est établié comme archevêché pour toute la Bretagne, et garde tout ou partie de ses terres dispersées jusqu'à Rouen. Demeure pourtant la référence à Alet, la capitale politico-religieuse des Coriosolites, mais son territoire se modifiera selon un nouvel évêché dont la matrice est celle du monastère de saint Malo, et qui semble suivre la géographie des installations du saint patriarche et de ses compagnons, en même temps qu'il se conforme à quatre petites entités seigneuriales: le Paou-Alet (futur "Clos-Poulet"), le Paoudouvr (Dinan), le Paou-Oc'h (Bécherel) et le Paou-Trocoët (Ploërmel). Est-ce à dire que l'évêque d'Alet est le nouveau comte de ce territoire à fort relent monastique? Celui de Saint-Pol le sera pour tout son évếché de Léon, celui d'Alet est du moins seigneur et maître de la péninsule qui s'étend de Saint-Suliac à Cancale, devenu le "Clos-Poulet" (breton latinisé "Poelet", altération d'un Paou-Aled), tandis que son évêché déborde vers le sud sur le Porhoët (ou Poutrocoët), constitué sur le tard (XIe siècle) en comté et rattaché en partie au diocèse d'Alet-Saint-Malo, avec pour premier seigneur Guéthenoc, fils ou petit fils cadet du duc Conan et fondateur de la forteresse de Josselin. Or, le blason de l'évêché d'Alet porte les mêmes couleurs que celui du clan de Porhoët, dont dérive celui des Rohan (de gueules, au château d'or pour le Porhoët et au loup d'or pour l'évêché).

La formation des pays de la nouvelle Bretagne, la Brittania Nova, ou Britannia Minor, comme on trouve dans les textes latins de cette époque pionière, s'inscrit donc dans un jeu d'influences alternativement monastiques et princières, sur la trame d'une déchue confédération armoricaine plus ou moins romanisée, et dans le mouvement migratoire des grandes familles de l'île où l'on compte de nombreux moines.

KMa

 

 

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Commentaires
Sant Mac'hloù hag e vro
  • Ganet e voe sant Mac'hloù e Lankarvan ha desavet gant sant Brendan. Meur a vanati e savas e Breizh-Vihan. Saint Malo naquit au monastère de Llancarvan, en Bretagne. Elevé par saint Brendan, avec lui il participa à la fondation de la nouvelle Bretagne.
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