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Sant Mac'hloù hag e vro

1 avril 2023

Gwiz sant Domnog

 

La truie de saint Domnoc

 

Domnoc, qui devint par la suite compagnon de saint Malo, avait un métayer que Malo trouva qui se cachait dans un fossé, parce qu’il n’osait avouer à son maître Domnoc que la truie mère de huit pourceaux qu’il avait à charge était morte de maladie. Malo, « mû par la pitié, toucha la truie de son bâton, et celle-ci se leva aussitôt » (Vita de Bili, traduite par Gwenael Le Duc). Domnoc ayant appris la chose, offrit ses terres à saint Malo. 

Les terres en question sont devenues la paroisse de Landomnec (Saint-Domineuc; "ecclesia de Sancto Domenoc" en 1220), trève de Tinténiac (Lesternoc)* avant le XIIIe siècle. Nous sommes au doyenné de Bécherel, ancien pays d'Ork (Pagus Orcheus / Paou-Orc'h), ou pays de Plouan, qui s'est constitué par l'avancée extrême des Bretons à l'est de l'Armorique vers le bassin de Roazon / Rennes, et qui forme, sur la carte de l'évêché de St-Malo, comme une corne pénétrant le pays des Redones (Rennes).

 

* Ternoc, fils de saint Judicaël et Moronéa.

 

 La corne de l'êvêché de Saint-Malo. Au nord, c'est l'évêché de Dol. A l'Est, l'évêché de Roazon.

 

 

 

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14 mai 2022

Ar relegoù

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Les reliques de saint Malo  *

 

*

  
      SansMoyenne
vitrail de l’église Saint-Malo de Dinan,  figurant le transfert des reliques

de saint Malo dans la nouvelle église Saint-Malo reconstruite intra-muros à Dinan.



La mémoire du pays était particulièrement portée par les reliques des saints, qui furent les premiers objets que les moines pensèrent emmener avec eux quand ils fuyèrent les dévastations vikings. Les reliques de saint Malo sont comme le point d’ancrage du futur évếché, de l’histoire de ce pays et de son identité. Elles ont nourri l’argumentation de Jean de Chatillon face à ses détracteurs, et c’était peut-être pour lui – et ce sera toujours pour le pays - comme la marque de fabrique de ce coin de Domnonée, sa mémoire indélibile au-delà des destructions et des falsifications. Ainsi, l’abandon actuel du culte des reliques n’est pas anodin.

    • Inventaire de la cathédrale

Un Inventaire du mobilier de la cathédrale appartenant à la fabrique nous indique de façon impressionnante qu’en la cathédrale se trouvaient – se trouvent encore ?- « deux grandes fiertes ou châsses quarrées, en forme d'églises, revêtues de tous côtés de lames d'argent ciselées en fleurs, colonnes et figures relevées en bosse, et dont une très-ancienne a été autrefois dorée, lesquelles sont remplies, l'une des reliques de saint Malo, l'autre des reliques de divers saints ; — deux autres châsses plus petites, de même forme, aussi couvertes de toutes parts de lames d'argent ciselées de la même manière, dont une fort ancienne et autrefois dorée, et aussi remplies de diverses reliques ; — deux chefs ou bustes d'argent, fort légers, qui renferment les testes ou crânes de saint Aaron et saint Honorat (Enogat?) ; — deux bras de bois avec les mains, revêtus d'argent ouvré, renfermant des ossements des bras de saint Malo et saint Aaron ; — deux petites figures de saints, fort légers, dont une en forme d'évesque portant en main une coste de saint Malo sous verre, et l'autre en forme et habit de juge, portant en main une relique de saint Yves ; — deux croissants montés chacun sur un pied en forme de croix, dont un de vermeil, et renfermant sous verre l'un une coste de saint Guillaume et l'autre une coste de saint Gaud [un autre saint du pays][nota : « Tous ces reliquaires, donnés anciennement par différents évêques et particuliers, et armoyés de leurs escussons, se mettent les jours de grandes festes sur l'autel, qui d'ailleurs est fort nud, sans contre-table ni autre ornement que deux grandes statues de bois et une crosse aussi de bois doré au milieu, au haut de laquelle est le pavillon ou suspension où se garde le Saint-Sacrement ».

 

    • Pourquoi les reliques ont-elles tant d'importance?

Les reliques furent grandement honorées et autour d'elles s'établit le culte des saints, en particulier de saint Malo. Elles furent très tôt proposées à la dévotion des fidèles, à l'endroit même où le saint établit son monastère et qui devint une cathédrale. Autour de ces dévotions naquirent aussi un pays et une identité qui perdurèrent tant que mémoire fut faite de l'histoire sainte qui en sont l'origine, et que restèrent debout les sanctuaires qui abritaient les reliques. Dès l'instant où cette l’histoire sainte et la foi furent l’une et l’autre attaquées, le monde brittonique chrétien et son identité furent mis en péril: c'est sans doute là l’une des choses essentielles qui motivèrent la lutte de l'évêque Jean de Châtillon. Quel est en effet le nerf de la guerre? Ce sont les choses spirituelles. Pour les saints pasteurs comme Jean de la Grille, l’évêché est d'abord quelque chose de spirituel, parce que partie tenante de la Sainte Eglise d’une part, et partie tenante d’un peuple, d’une nation d’autre part. On voit au début de l’histoire de la Bretagne armoricaine le combat qu'engagent nombre de saints bretons contre leurs compatriotes restés dans le paganisme, à commencer par leur propre famille, comme celle de saint Brieuc, et simultanément celui d’une Bretagne rapidement menacée par les Francs et l’assimilation culturelle. Ceux-ci savent aussi quel est le nerf de la guerre, et vont tenter de vider la Bretagne de sa substance première: son âme, donc de ses monastères, de sa langue et de sa culture. Rappelons-nous avec quelle hâte et quelle véhémence Louis le Pieux, après avoir vaincu le roi Morvan, somma l’Église bretonne d’abandonner le rite britto-irlandais. Rappelons-nous qu’une « foule » de reliques dûrent quitter leur pays pendant les invasions normandes. Rappelons-nous que les trois-quarts des chapelles de Bretagne furent détruite pendant la révolution française. Or, les reliques de saint Malo sont la matrice de l’Église malouine, sa carte d’identité, son ADN, tout comme l’était le rite britto-irlandais.

Que sont les reliques ? Elle sont les corps des saints, ce qu’on a pu en garder mais aussi le signe de leur présence parmi nous et de leur intercession, parce qu’elles sont le signe très marquant de l'alliance entre Dieu et les hommes et comme les témoins visibles sur terre , à travers les siècles, de cette sainteté définitive, celle que conquit saint Malo en personne, et point de départ d'un pays-évêché.  Ceux qui voulurent frapper la Bretagne au cœur, s’en sont pris à ses saints fondateurs et donc à leur reliques. Voici un article où apparaît le lien entre foi et culture, où l'on voit qu'on s'en est pris aux deux pour pouvoir absorber la Bretagne. Ce fut un lent et patient travail d'acculturation dont les têtes pensantes de Bretagne commencent  aujourd'hui à prendre conscience.


    • Britannia Monastica…

"Depuis ses origines, la chrétienté bretonne armoricaine avait vécu en marge de l’Église gauloise : ses horizons étaient plus volontiers insulaires que continentaux. Les événements des VIIIe et IXe siècles font qu’elle rentre peu à peu dans le giron de l’Église romano-franque voulue par les Carolingiens : accompagnant cette ouverture forcée vers l’est, ce sont des livres liturgiques, des tenues sacerdotales, des objets divers du culte qui pénètrent en Armorique, autant de dons du roi à un clergé autochtone qu’il entend rallier à sa cause en l’amadouant. Et avec ces cadeaux, les linéaments de la Renaissance des Lettres et des Arts arrivent féconder la terre des Bretons longtemps demeurés rétifs aux modèles culturels francs: la remarquable production de livres écrits et enluminés dans certains scriptoria armoricains démontre la capacité nouvelle au IXe siècle des moines – copistes, écrivains ou illustrateurs – à assimiler à leur façon le meilleur des techniques et du savoir encouragés à l’ombre du palais impérial, à l’imitation des plus florissantes maisons du monachisme bénédictin récemment rénové par saint Benoît d’Aniane."Avec l’acculturation en cours, ce sont aussi des reliques de saints qui pénètrent dans la péninsule. Jusque-là celle-ci était demeurée réfractaire au culte des Bienheureux qui n’étaient pas bretons de nation du moins dans sa moitié occidentale où dominait l’élément celtique – les comtés de Nantes et de Rennes, dans une moindre mesure celui de Vannes, de langue latine et parties prenantes de la vieille civilisation gallo-romaine, n’ont pas ignoré en effet aux temps mérovingiens, autour de leurs évêques, les saints gaulois ou universels en vif contraste avec l’Église proprement bretonne. Ces préventions n’ont plus cours un siècle après les débuts de la conquête franque (753), quoique les hagiographes s’attellent dans le même temps à la mise par écrit des Vies des plus vénérables fondateurs de leurs maisons, dans un état d’esprit mitigé, balançant entre regrets d’une existence supposée héroïque, vivifiante grâce à une foi abrupte en Christ, et soulagement vis-à-vis du cours nouveau, jugé plus vivable, entamé en pleine communion d’esprit avec Rome. De la Ville éternelle provient justement une relique insigne, confiée par le pape Léon IV à l’abbé de Redon, Conwoion, venu l’entretenir, vers la fin de 847, de la politique ecclésiastique de Nominoë à l’encontre des évêques simoniaques de sa province : le corps du saint pape Marcellin, treizième successeur de saint Pierre, martyrisé sous Dioclétien en 304. D’après le Liber Pontificalis, Ratuili, l’auteur des "Gestes des Saints de Redon" résume ce qu’il a pu apprendre du pontificat et du martyre de Marcellin, mais il ne s’étend pas sur le voyage de retour de son abbé car cet épisode licite s’avère sans histoire. Seule la grandiose cérémonie de réinhumation des saints restes dans l’église de Saint-Sauveur retient son attention puisque c’est à cette occasion que les reliques entrent dans le patrimoine de l’abbaye – officiellement, elles constituaient pour encore un cadeau du pape à Nominoë, en remerciement de la couronne d’or sertie de joyaux qu’il lui avait adressée, mais le prince breton s’en dessaisit ce jour-là en faveur des moines dans un grand concours de peuple, au chant des hymnes et des laudes, en présence des Grands de son entourage. Depuis lors, avec foi et dévotion nous dit-il, les pèlerins affluent de toute la Bretagne, et même de contrées plus lointaines, afin de retrouver la santé sur la tombe. Sur cette apothéose placée sous le signe de la joie partagée d’un transfert réussi, Ratuili clôt le deuxième livre des Gestes".

(Britannia Monastica, n° 7, 2003, p. 21-31)

On voit donc combien sont honorées les reliques des saints, et comment, par la même occasion, elles deviennent un instrument politique de première importance.

Au regard de la Foi chrétienne, ces restes physiques, signes de la permanence des saints dans l’Église, sont d’abord des canaux de la Grâce sanctifiante par laquelle arrivent – et sont arrivées – multiples guérisons. Mais toujours, l’attachement des Bretons à leurs « vieux saints » ou saints fondateurs, sera lié étroitement, en plus du fait religieux, à leur effort naturel et multiséculaire de mémoire pour conserver leur culture, et par là-même, leur identité. La dévotion aux saints, dans ce sens, se confond avec le culte des reliques par lesquelles la conscience nationale a pu perdurer. Il n’est pas par hasard si plus de la moitié des chapelles et les reliques qu’elles contenaient ont disparu en Bretagne au cours de la révolution française, emportant avec elles tout un pan de la mémoire d’un pays. Puis la peste du doute, s’adjoignant à un esprit d’aveugle sujetion à la France - d’abord parmi le clergé - emporta ce qu’il était resté de conscience nationale dans les sanctuaires du pays.

 

. Mémoire et permanence

 

Laissons d’abord parler le diacre Bili, au IXe siècle, à propos de la grande dévotion qu’il faut appporter aux corps des saints.

 

Quand à nous, qui habitons le diocèse d’Alet, dans la mesure de nos possibilités, nous devons sans répit rendre grâces au pourvoyeur de tous ces bienfaits, Lui qui a illuminé nos régions occidentales de nombreux corps de saints comme d’autant d’étoiles très brillantes, et nous croyons que les âmes de ces saints brillent semblablement aux Cieux. Chaque fois que nous rappelons leur souvenir, sans aucun doute, ils sont pour nous nos intercesseurs auprès du Seigneur. » 

 

« La grandeur de l’amour témoigne pour celui-là dont la sollicitude envers ses amis ne s’est éteinte ni dans la mort, ni dans la sépulture, puisque, même après qu’il ait quitté ce monde, sa renommée s’emploie sans relâche à le démontrer »

 

« L’oubli n’a pas diminué cet apôtre (saint Malo) en pouvoir ni envers vous, ni envers moi, car maintenant il possède, à jamais et dans les actes les plus sacrés, la Vraie Vie. »

 

Les reliques demeurèrent à Saintes jusqu'au Xe siècle. Mais les miracles posthumes opérés à Saintes sur le tombeau de saint Malo (appelé en Saintonge Macoux, Macoult) excitèrent la jalousie des Bretons qui ramenèrent à Alet le chef et le bras droit de leur évêque transfuge.

Les reliques conservées sur l'ile d'Aaron, depuis leur retour de la Saintonge, étaient donc "le chef et le dextre", nous renseigne Bili, mais elles n’y restèrent que peu de temps. Au même siècle de leur rapatriement (Xe), à cause des invasions vikings, une nombreuse population de princes et de moines quitta le pays, et l’un de leurs réflexes, lors de la fuite, fut d’emporter avec eux les reliques de la foule des saints fondateurs du pays qui furent donc du voyage, eux aussi. Ces reliques furent ainsi dissémi­nées dans toute l’Europe pour y être mises à l’abri. C’est pourquoi à Longpont, par exemple, au sud de Paris, la communauté bretonne de là-bas honorait une fois l’an, en une fête solennelle, les reliques de saint Malo : ce fut Salvator, évêque d'Alet, qui les avait portées dans ce pays, accompagné de Juvan, abbé de Léhon (Dinan), celui-ci ayant aussi avec lui celles de saint Corentin; en route, se joignirent à eux les évêques de Dol et Baioc (Bayeux).

 Droite

Saint-Maclou à RouenSalvator déposa d'abord les reliques de saint Malo à l'ancienne basilique de Saint-Barthélémy (Paris) "où leur présence est Gaucheattestée dès 9631. Puis, le crâne de saint Malo accompagna d'autres reliques bretonnes jusqu'à Montreuil, dans l’Artois, où une partie est encore aujourd'hui conservée (abbaye de Saint‑Sauve), et d'où aussi proviennent les reliques de saint Malo (sous le nom de saint Maclou) éparpillées dans les Flandres, aux Pays-Bas, en Rhénanie2. Il fut trouvé à notre époque "une partie notable du chef de saint Malo" à Montreuil (R. Rodière), aux côtés des os de saint Guénolé. Sommés de restituer les reliques, les moines de Saint‑Victor, à Paris, s'adjugèrent le menton de saint Maclou. Un os de l'épaule du saint fut vénéré à Saint‑Maclou de Moiselles. Un buste reliquaire, dans l'église de Saint-Malo-des-Trois-Fontaines, au diocèse de Saint-Malo, contient encore aujourd'hui des reliques du saint. La cathédrale de Quimper-Corentin en possède également.

  Voici quelques haltes que firent dans leur fuite les reliques de saint Malo: Saint-Michel-du-Pas (chapelle du roi Clotaire); église Saint-Magloire de Paris; église St-Julien-du-Haut-Pas (Paris); abbaye Ste-Victoire (Paris); Pontoise, Saint-Maclou-de-Moisselles, Rouen. C’était comme une partie de la sève vitale de la Bretagne qui s’en allait. Cependant, là où les reliques furent transférées, en dehors de Bretagne ou peut-être aussi en des endroits difficiles d’accès (à Locmalo par exemple, en pays Pourlet), la dévotion aux saints auxquelles elles étaient rattachées se perpétua.

D'après le Processional de l'abbaye royale de Saint-Sauveur, on célébrait à Montreuil, dans les Flandres artoises, la fête de la translation de saint Malo le dimanche dans l'octave du Saint-Sacrement, par une proces­sion solennelle qui se rendait, après la Messe solennelle, à la Grande Place de la ville, en chantant une hymne et des responsoirs propres, et à plusieurs autres jours de l'année la châsse de saint Malo recevait de grands honneurs. Tandis qu'en Bretagne, Guillotin de Corson note que "le diocèse de Saint-Malo faisait encore au siècle dernier la solennité de la trans­lation de son premier évêque, le deuxième dimanche de Juillet"3: mais s'agit-il de la translation depuis Saintes, où Léonce avait bâti une église pour recevoir le corps de saint Malo? Ou bien de la translation d'après les invasions vikings, quand les reliques de saint Malo revinrent au pays? 4 Témoin aussi peut-être de la permanence des reliques de saint Malo dans un pays affaibli par les invasions normandes, il y eut ce fait marquant: un resserrement de la population se produisit autour du monastère de l’ile d’Aaron, la Saint-Malo intramuros d’aujourd’hui, comme un retour de ferveur. Ils délaissèrent Alet et sa cathédrale,"et pendant que son port devenait désert (St-Servan), navires, mariniers, marchands, foisonnaient et prospéraient dans l'ile d'Aaron"… (Albert le Grand). Si il y eut peut-être des causes économiques à cela, il est à parier que le sanctuaire de l’ile d’Aaron était depuis longtemps le centre spirituel du pays d’Alet, sachant que c’est là que saint Malo s’était établi, qu’un monastère s’y développa et que les reliques du saint y furent déposées. Après les deux destructions successives du monastère, l’une par les troupes de Charlemagne, la seconde par les Normands, c’était une revanche de l’histoire et un retour aux sources, près des reliques de saint Malo.

 

Et voici un autre fait qui témoigne de la permanence dynamique des reliques dans les siècles. Nous sommes fin novembre de l'an 1693. Les Anglais menacent la cité de Saint-Malo avec leur flotte Saint-Malo déployée alentour. "Tous les Malouins qui le peuvent regroupent leurs biens les plus précieux pour les porter hors des remparts. Craignant les bombar­de­ments, on invite les femmes à emmener les enfants. De la cathédrale, Monseigneur de Guémadeuc organise une procession pour obtenir l'aide divine; par la porte Saint-Thomas, la voilà qui monte sur les remparts (d'où l'on domine l'armada anglaise) (…) Les reliques de saint Aaron, de saint Gurval et saint Vincent (de Sarragosse) sont promenées. Jean Jocet de la Barbottais, le doyen, a le privilège de porter le bras d'argent contenant celle de saint Malo. Puis l'évêque ferme la procession, bénissant les défenseurs, la mer, les forts et les fidèles présents au chant d'"A furore anglorum, libera nos Domine"!

 

  • Prodiges et miracles

 

La dévotion des reliques engendra bien des miracles, ceux-ci entraînant souvent la dédicace d’une église, d’une chapelle, d’une fontaine au saint, ou encore des donations de terres à l’Eglise. L’exemple le plus connu de l’histoire des reliques de saint Malo est celui de Saint-Malo-de-Fili. Saint Malo s’était éteint à Saintes, ses reliques y demeurèrent. Quelques quatre siècles plus tard, l’évêque Bili souhaita relancer le culte au saint. Une délégation de clercs de tout le pays : Paou-Aled (Paoudouvr sans doute inclus)et Porc’hoed,fit le voyage pour rapatrier le corps du saint. Ayant obtenu gain de cause pour quelques membres, il s’en revinrent en Bretagne et sur leur parcours plusieurs miracles et prodiges advinrent autour des reliques, qui nous sont narrés par Bili dans sa Vita, parmi eux celui-ci : en chemin, ils s’arrêtèrent en un lieu majestueux qui surplombe la Gwilun (Vilaine), et là un prince dénommé Fili, machtiern de Guicpri, fut guéri de sa maladie au contact des restes du corps de saint Malo. Et Bili évoque aussi le prodige suivant lors du voyage de retour vers le Paou-Aled, et qui reproduisait celui qui advint quand saint Malo lui-même était revenu de Saintonge :

 

De pluuia cum eo ambulante. Et inde uenientes multas dicumbitiones inuenerunt, et ad pagum Aletis cum gemmis optimis peruenientibus, sicut antea contigerat pluuia illos comitabat. Mirum in modum, non eos preuniebat, sed leniter eos a longe sequebatur, ut cuncti simul intelligerent quod misericordia illis ex Deo et a sancto Machute aduenisset, ita ut certatim omnes uiri simul et femine et que sequebantur et qui preueniebant ad eos flectentes genua occurrerent. Et laudantes Deum ex uno ore ad insulam que uocabatur Aaronis, que usque hodie postea nomine sancti Machutis uocatur, lenaniam sine intermissione canentes peruenerunt. Et tribus diebus ac tribus noctibus super altare ponentes, ante membra illa uigilantes et multas possessiones in dicumbitione eis dantes, uigilauerunt: :

 

« De la pluie qui les accompagnait. Et sur leur route, ils recueillirent de nombreuses possessions, et arrivèrent au pays d’Alet avec leur précieux trésor. Et, comme cela s’était produit auparavant, la pluie les accompagnait. D’une manière merveilleuse, elle ne les précédait pas, mais elle les suivait de près depuis longtemps, afin que tous comprennent que cela venait de Dieu et de saint Malo; et donc, tous les hommes et femmes qui, ensemble, suivaient ou précédaient, venaient à eux et se mettaient à genoux; louant Dieu d’une seule voix, chantant les litanies sans arrêt, ils arrivèrent à cette île qui est appelée Ile d’Aaron, et qui par la suite jusqu’à nos jours s’est appelée du nom de saint Malo. Ils posèrent ces reliques sur l’autel, veillèrent devant ces membres et leur accordèrent de nombreuses possessions perpétuelles; ils veillèrent pendant trois jours ».

 

Voici maintenant la relation, toujours par le diacre Bili, d’un miracle survenu autour du tombeau de saint Malo :

 

 Nam post sepulturam eius, quod ut putamus pretereundum non est, duo orbi ex uilla que uocatur sauiniaco ad sepulchrum uiri Dei peruenientes, oculorum suorum luminaria postulantes, humum de eius tumulo in aquam commiscentes, loca obscuritatis inde lauantes, diuina dispensatione Dei procurante, ne uirtus sancti minor fieret in diuinitate quam dum uixerat in corporalitate, uisionem oculorum prisinam recipere meruerunt : :

 

« A notre sens, en effet, on ne saurait négliger ceci : après qu’il ait été mis au tombeau, deux aveugles originaires de la ville que l’on appelle Sévignac5 vinrent au tombeau de l’homme de Dieu pour demander la lumière de leurs yeux. Ils mêlèrent de la terre de son tombeau à de l’eau, et ils lavèrent l’endroit de leur cécité ; et, par la divine grâce de Dieu, afin que la vertu du saint ne soit pas moins grande dans son état divin qu’elle ne l’avait été de son vivant, corporellement, ils méritèrent de recouvrer la vue . »

 

Les prodiges commencèrent dès l’arrivée de la délégation malouine en Saintonge, « douze du pays d’Alet et douze autres du pays que nous appelons le Paoutrecoët » (Porhoët)6, avec à leur tête le prince Roiantworett. Après avoir essuyé le refus du clergé de Saintes, ils supplièrent le roi des Francs, Philibert, qui ordonna trois jours de jeûne et de prière :

 

 Nona tertie diei adpropinquante, ieiunio firmiter ac unanimiter ab omnibus uiris simul et feminis completo, maximeque illis uiginti quatuoi uiris qui illum exquirere ierant orantibus ac Deum deprecantibus indesinenter sanctoque Machuti multas dicumbitiones promittentibus, nec die noctuque tunc dormientibus, sed ex toto corde fideliter firmiterque orationem dominicam sine intermissione cantare frequentatibus Deo annuente corpus sancti Machutis, dicentes : « Sancte Machu, si tibi placet, corpusculum tuum exin tollere, aut si aliquid ex eo reddere, consilium quod nobis aliisque auxilium tribuet ostende :

 

« Et quand approcha la neuvième heure du troisième jour, quand le jeûne eut été terminé, sans faillir et par tous, hommes et femmes, et surtout par ces vingt-quatre hommes qui étaient partis en quête, qui priaient et suppliaient Dieu sans répit en promettant moult territoires à saint Malo, sans dormir ni de jour ni de nuit, mais au contraire chantant sans arrêt, de tout leur cœur, avec foi et persévérance, l’oraison du Seigneur (le Pater), par la grâce de Dieu, en élevant le corps de saint Malo sur l’autel, ils dirent : « Saint Malo, s’il te plaît, laisse-nous un conseil qui puisse nous aider, nous et les autres ! »

 

Quatre clercs alors soulevèrent le corps du saint dont « le chef resta dans la main de l’un et la dextre dans la main d’un autre, tandis qu’ils ne pouvaient absolument pas ôter de l’autel ce qui restait du corps, ni en ôter autre chose » :

 

 Unde clarius luce omnes intellexerunt quod separauerat Dominus sanctusque Machu quod Britonibus uenire contigeret : « Et quando illi foras cum gemmis pretiosis potimisque pergebant, illud quod super altare remanserat ab oculis aspicientium euanuit et, querentibus quis illud abstulerat, in suo munumento repertum est, ita ut per hoc patenter agnoscerent quod uoluntas Dei de eo contigisset. Illi autem qui cum capite et dextra manu ueniebant magnum gaudium habebant :

 

« Alors tous, bien mieux éclairés, comprirent que le Seigneur et saint Malo avaient séparé ce qui devait revenir aux Bretons (…) Et quand ils sortirent avec ces joyaux si précieux, ce qui était resté sur l’autel s’évanouit aux yeux des spectateurs ; ils cherchèrent ce qui l’avait emporté, et ils le retrouvèrent dans son tombeau, afin qu’il soit clairement su que c’était la volonté de Dieu qui avait agi. Quant à ceux qui repartaient avec le chef et la dextre, ils débordaient de joie ».

 

 

1 Les Dossiers de la Société d'Histoire – Jean de Châtillon, éd. Cristel 2014

2 idem

3 Pouillé de Rennes, tome 1.

4 F. Plaine, "Translatio in Britanniam s. Machuti, episcopi Aletensis" (Translation du corps de saint Malo)

5 Sévignac: près de Dinan

6 « duodecim ex Pago Aletis et alii duodecim ex pago quem uocamus pagum Transsiluam »

11 mars 2022

Yann ar Gael

*

Grande

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Yann ar Gael, eskob Sant-Mac'hloù, a stourmas a-enep kloer gall Marmoutiers

 *

La lutte de Jean de Châtillon (saint Jean de la Grille),

évêque de Saint-Malo, contre les prétentions du clergé franc

 

 

 

 

 

 

 

 

 

A l'issue de l'époque fondatrice qui vit la Bretagne poser les jalons de son installation en Armorique, le royaume de Domnonée voit sa culture péricliter dans sa moitié orientale et son nom finalement disparaître. Les monastères de rite britto-irlandais ont disparu et l’Eglise bretonne est dans le giron des franco-latins, tandis que la culture se retranche dans le monde paysan et chez les petits hobereaux, le monde protégé des chemins creux emboués. La Bretagne ilienne n’est plus qu’un souvenir et celle du continent essaiera de survivre encore quelques siècles, sous la menace permanente de la France et de l’Angleterre. Menace politique tout autant que culturelle, qui exista déjà du temps des Francs carolingiens, mais devint encore plus menaçante au lendemain des dévastations vikings. Le roi Nominoë considérait que les moines francs, qui tentaient d’essaimer en Bretagne, n'étaient rien d'autre que des agents à la solde de Charles le Chauve et consorts, dont le but était de coloniser les évêchés de Bretagne sous le Joug de l'Archevêque de Tours, ancienne capitale de la 3ème Légion Lyonnaise de Rome, et au mépris des traditions de l'Eglise britto-irlandaise. Et puis, nous arrivons au XIIe siècle qui voit l’avènement de Jean de Chatillon au siège épiscopal d'Alet-Saint-Malo. Notre évêque engage alors une lutte acharnée contre la communauté française (moines de Marmou­tiers) qui s'est installée sur l’île Aaron, là où les reliques de saint Malo étaient conservées, la future Saint-Malo intramuros.

 

Jean de Chatillon naquit sans doute entre Fougères et Vitré, à Dunan-Gwennel (Châtillon-en-Vendelais), mais fut formé à Paris et Blois, puis fut chargé de gérer les affaires de l'abbaye Sainte-Croix de Guingamp. C'est sans doute sous l'influence d'Etienne et Havoise de Bretagne que Jean fut nommé évêque d'Alet-Saint-Malo. Son prédécesseur, Donoald, troqua son nom celtique pour celui de Benoît : il semble que c'était la mode de l'époque, où l'on devait montrer patte blanche de sa latinité en Bretagne. Dans le même esprit de défiance à l'égard de l’Église celtique (en même temps d'une volonté politique très appuyée des Capétiens), Benoît fut sacré à Tours en 1120: cet événement marque le retour de l’obédience de l’Église bretonne à Tours, au détriment de Dol que le roi Nominoë avait érigé en archevêché pour la Bretagne. Donoald-Benoît fit venir sur l’île d'Aaron (future Saint-Malo intra-muros) des moines de la communauté française de Marmoutiers, comme c’était courant dans tout la Domnonée orientale pour combler les dévastations vikings. Quant à son successeur Jean de Chatillon, "aucun de ses actes n'est en faveur de cette abbaye"1, tandis qu'il favorise Boquen, Saint-Jacques de Montfort, Buzay de Nantes, Saint-Méen où l’ancienne observance monastique connaît un renouveau grâce aux nouveaux ordres… Réputé pour être "gardien de la foi et de l'ordre" et "très préoccupé des affaires de l'Eglise universelle et non exclusivement de son diocèse", ce ne fut donc pas par caprice que Jean fut un ennemi intraitable de Marmoutiers et qu'il finit par supprimer son enclave sur l’île d'Aaron en 1146, en en chassant ses moines bénédictins, "bien qu'ils essayèrent plusieurs fois après cette date de faire rouvrir le procès". Les papes successifs Anastase et Alexandre III confirmèrent d'ailleurs toujours la position de Jean de Chatillon.

Cette expulsion s'accompagna du transfert de siège de l'évêché: jusque là officiellement en face de l'ile Aaron, à Alet (actuelle Saint-Servan), Jean tenait à ce que le siège soit désormais là où l'on avait vénéré les reliques de saint Malo, là où le saint vécut lui-même et se développa un monastère breton, vis-à-vis de la péninsule gallo-romaine d'Alet.

 

On se pose la question du pourquoi de ce changement et de l’animosité de l’évêque Jean envers les mouchards de Marmoutiers, dont les motifs se sont perdus dans le temps. Il serait lié à l’époque, au lendemain des invasions vikings qui laissèrent exsangue le pays, et particulièrement la Domnonée orientale qui vit un afflux considérable de population gallo-franque déferler sur le pays, parmi laquelle des religieux venus suppléer aux monastères détruits mais au détriment des anciennes coutumes du pays.

Sachons d’abord que c’est sur l’ile Aaron que reposèrent les reliques de saint Malo, au monastère qu’il avait fondé, et non pas en la cathédrale d’Aleth, à Saint-Servan . Vers 702, 24 bretons sous la conduite de Roiant Woret, aidé par Rivoëd, prennent le chemin de Saintes, pour y quérir la tête et le bras de saint Malo, puis les déposent au monastère de l'île d’Aaron. Partant de ce fait, le résultat des recherches de quelques membres de la Société d'Histoire et d'Archéologie de Saint-Malo, parue dans les "Dossiers" de 2014, penche vers la thèse d’une affirmation définitive de la bretonnité du siège, face à une tentative des deux prédécesseurs de Jean de Châtillon d'en occulter l'identité au profit d'une romanisation / latinisation à l'extrême. Il fallait soustraire l’Église de Saint-Malo à l’influence franque et en faire une forteresse de l’Église de Bretagne, en un lieu qui, paraît-il, recevait à l’époque une affluence de population au détriment d’Alet. Jean de Châtillon fait alors bâtir sur l’îlot une cathédrale, ce qui signifie, en ce « Moyen Âge », une ville avec ses couvents, ses artisans, ses marchés… Il fonde également dans le cloître de ce lieu de culte une école publique. Il obtient aussi de nombreux droits dont celui de “ville close” lui permettant de bâtir en 1155 des remparts et des tours pour défendre la cité naissante. Dorénavant, 16 hectares se trouvèrent enveloppées d’une ceinture de pierre.

 

Dès la fondation de Saint-Malo, on ressent l’indépendance qui caractérise ses habitants et une défiance de tout ce qui pourrait venir de l’Est. En effet, l’évêque refuse l’aide du roi de France pour protéger la ville et décide que les Malouins se garderont eux-mêmes. Il crée donc une milice dans laquelle tous les hommes doivent servir. Cela ne lui semble pas suffisant pour protéger la ville des voleurs (et surtout ses abords), où des navires commencent à accoster en nombre. Il fait venir d’Angleterre 21 dogues pour patrouiller chaque soir sur les grèves. Ceux-ci deviennent l’emblême de la cité, à la suite du loup d’or qui orne celle de l’évêché : tradition décidément défensive du pays, de l’ancienne marche bretonne contre les envahissements du Franc.

Jean de Châtillon fait aussi preuve de talent dans l’administration de l’îlot qui grandit de jour en jour. II dote Saint-Malo de toutes les fonctions et “administrations” nécessaires à l’essor d’une ville qui lorgne à nouveau de plus en plus vers le large et semble lier son avenir à celui du commerce maritime. C’est à l’image d’une Bretagne qu’on voudrait faire dépendre du continent, alors qu’elle semble destinée à s’épanouir au sein du confédération maritime (Pays Basque, Galles, Ecosse, Irlande, Flandres...)

Par ailleurs, faisant preuve d’une grande charité, sa réputation auprès des habitants ne cesse de croître. La foi chrétienne de Jean de Châtillon n’est pas étrangère à ses projets pour Saint-Malo et la Bretagne, vouées à être surtout des places fortes de la justice et de la paix des cœurs, et pour cela, bien assises dans leur pays et non pas des annexes politiques des Capétiens et des réservoirs de main d’œuvre où la religion servirait d’alibi à des prétentions étrangères.

Depuis plusieurs siècles déjà, les évêques d'Alet se nomment "de St-Malo", et/ou 'in Aleta civitate", faisant la distinction entre l'origine gallo-romaine du lieu (Alet) et la bretonnité du monastère qui n'était pas situé sur le site du siège, mais sur l’île d'en face : l’île d'Aaron, l’ile coriosolite de Canalc’h, devenue l'actuelle "Saint-Malo", entourée de ses remparts et dominée par la flèche bretonne de la cathédrale, tandis que ne peut lui faire concurrence la coupole romaine néo-classique (XIXe) de l’église de Saint-Servan, en vis-à-vis de l'autre côté de l’anse des Sablons. Or, si nous pouvons aujourd'hui encore contempler cette cathédrale sur le site même où saint Malo vécut puis fut honoré, c'est bien grâce à Jean de Châtillon, qui ayant ressuscité le sanctuaire du saint fondateur, peut être considéré comme le "second saint fondateur de Saint-Malo". Oui, fondateur de la ville mais surtout rénovateur de mémoire, du siège épiscopal et de l'identité: "L'évocation du passé romain (d'Alet) ne fait visiblement pas le poids face à la puissance fédératrice de saint Malo, vrai facteur du diocèse"2. Auparavant, le siège de l'évêché fut un temps déplacé dans le Porhoët, comme en vis à vis du pays gallo-romain d’Alet, de surcroît très tôt aux mains d’une famille franque du Maine (voir au chapître « Le miroir des peuples »).

 Gauche

GaucheYann ar GaelLe Pape Eugéne III « fit paraître devant lui les deux parties et examina leurs raisons avec une scrupuleuse attention, puis il les renvoya devant l'archevêque de Bordeaux et les évêques de Chartres et d'Angoulême, qui appelèrent à Périgueux l'évêque d'Aleth et Garnier, abbé de Marmoutiers, le monastère tourangeau qui essaimait ses dépendances dans tout l’Est de la Bretagne. Ces commissaires du Souverain-Pontife y reçurent les dépositions des témoins de Jean de Châtillon: il fut prouvé que l'église de Saint-Malo avait été anciennement siège épiscopal, c'est-à-dire avait fait partie du domaine épiscopal d'Aleth, et qu'en conséquence l'évêque Benoît n'avait pas eu le droit d'aliéner cette église ; Jean-de-la-Grille démontra même que Rivallon et Donoald, successeurs de Benoît, n'avaient pas voulu ratifier cette aliénation. « Sur quoi les juges délégués ne purent se refuser à investir l'évêque d'Aleth tant de cette église de Saint-Malo que de toutes les dépendances qu'elle avait dans le temps où les moines s'en étaient saisis. Le Pape, ayant été informé de cette sentence, la confirma par une bulle donnée à Viterbe le 16 août 1152 [jour de la Saint-Armel, celui qui terrasse le serpent], dans laquelle il imposait là-dessus aux religieux (de Marmoutiers) un silence perpétuel » [nota : Vie de saint Jean-de-la-Grille, par l'abbé Manet, p. 39. — Ce silence ne fut guère observé par les moines de Marmoutiers, qui voulurent encore poursuivre l'évêque de Saint-Malo, sous le pontificat des successeurs d'Eugène III. Saint Jean-de-la-Grille retourna à Rome pour la troisième fois, et il fallut de nouvelles bulles d'Anastase IV, en 1154, d'Adrien IV, en 1157, et d'Alexandre III, en 1159, pour faire taire définitivement les réclamations de ces religieux » (extrait du Pouillé de Rennes).

 

 

Annexe

L’affaire ne concerna pas seulement le sanctuaire de l’ilot d’Aaron. Jean de la grille « eut notamment à se plaindre d'eux au sujet de leur chapelle de Notre-Dame de Bécherel, « in oratorio de Becherel quod in parochia de Ploasno constructum est ». Le saint prélat les menaça d'excommunication et interdit l'oratoire de Bécherel. 

 

http://www.infobretagne.com/becherel.htm

1 "Jean de Châtillon, second saint fondateur de Saint-Malo", Société d'Histoire et d'Archéologie de Saint-Malo, éd. Cristel 2014

2 idem

29 décembre 2021

Santez Tigrid

Goueler a hiziv, d'an 30 a viz Kerzu: Santez Digrid, c'hoar da sant Padrig ha bet dimezet da roue Gradlon. Ganet war hanternoz enez Vreizh - lec'h ma kaver Glasgow hiziv - e teuas gant e gerent da Vreizh-Vihan, lec'h ma voe roet dezho douaroù gant Konan Meriadeg, tro-dro da Aled (Sant-Mac'hloù). Goude marv he gwaz ez eas da gaout e vreur Padrig en Iwerzhon hag eno e varvas en ur manati. D'an 31 a viz Kerzu e lidomp santez Darerc'ha, c'hoar da santez Digrid, hag he mab sant Maiog.
*
30 Décembre: on trouve aujourd'hui au martyrologe sainte Trigrid.
Sainte Tigrid était la fille de Calpurn et Conchesse, et sœur de saint Patrick, sainte Darerca (mariée à Conan Mériadec) et d’autres enfants parmi lesquels on compte d’autres saints, tous retenus précieusement dans la Vie des Saints de Bretagne, écrite par Joseph Malo de Garaby et sans laquelle la mémoire de beaucoup de saints du pays aurait disparu. Voici quelques extraits de sa vie de sainte Tigrid, notée au 30 Décembre :
« Elle vint avec ses parents habiter la Bretagne, si même elle n’y naquit point, ainsi que ses frères et soeurs ». Il faut comprendre ici « Petite-Bretagne » comme on l’appelait à cette époque de l’installation des Bretons en Armorique, la « Bretagne » désignant l’ile pleinement habitée par les Bretons en cette fin de IVe – début Ve siècle. Les Anglais (Anglo-Saxons) n’avaient pas encore envahi l’ile et le chef militaire Conan Mériadec s’était vu attribuer par Maximin (Macsen Wledig), empereur, des terres sur le continent, en Armorique. C’est ainsi que de nombreuses familles bretonnes s’installèrent sur le continent, dont celle de Tigrid, famille originaire du nord de la Bretagne (Dunbarton, Glasgow) et d’Irlande. Son père se vit attribuer des terres autour d’Aled (St-Malo).
« Ses belles qualités la firent demander, en 382, pour épouse, par Gradlon, compagnon d’armes de Conan, puis duc de Domnonée (royaume du sud de l’ile puis britto-armoricain plus tard), comte de Cornouaille, et enfin, en 434, troisième roi de Bretagne » (armoricaine).
« Dieu bénit l’union de Tigride et de Grallon ; il leur accorda une nombreuse postérité, que la Sainte eut soin d’introduire dans les sentiers du Ciel. Elle y marchait elle-même d’un pas rapide de constant. A la mort de son mari, en 445, elle rejoignit (son frère) saint Patrick et d’autres pieux personnages en Irlande », où elle s’est sans doute éteinte dans un monastère.

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27 décembre 2021

Mab ar Gouloù

 

S-Malo024

"Gouloù" signifie lumière en breton. Vieux mot de la langue brittonique, il serait l'un des composants de "Malo", Macutus, Maclou... et autre variantes du saint patronyme. Du côté de la Normandie, on trouve l'ancienne forme "Maclou", comme fossilisée. Saint Malo y fonda un monastère à Rouen, où l'on trouve une église qui lui est dédiée. Cette forme "Maclou" nous rapproche de la racine du patronyme Malo, et nous invite à le décomposer comme suit: Mac-Gouloù, qui signifie Fils de la Lumière. La vita de saint Malo nous renvoie, en divers épisodes, à cette Lumière que son nom même évoquerait. Il naquit la nuit de Pâques, puis il y eut plus tard le miracle des flambeaux au monastère de Lancarvan, ou encore, l'évếnement  qui suit, servenu à Saint-Malo.

Le tiern Rethwald essaya de détruire le monastère de saint Malo mais fut alors frappé de cécité. Ayant fait amende honorable, il reçut de saint Malo de l'eau bénie au nom de la sainte Trinité qu'il appliqua à ses yeux, et alors il recouvrit la vue, et voyant les choses encore mieux qu'avant : ille accepit inluminationem cordis petitione sancti cum luminte oculorum… « à la demande du saint il reçut l’illumination du cœur avec la lumière des yeux, de sorte qu'il pouvait voir par l'esprit et la raison ce qu'il n'avait pu voir auparavant avec les yeux de sa tête »

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23 juillet 2021

Koed-Kidan

 

 

1913BelAir-StMalo-Beignon

Saint-Malo-de-Beignon: chapelle Saint-Malo, disparue

 

Au sud de l'évêché de Saint-Malo, la création du camp militaire de Coëtquidan, participa à la perte de l'identité du pays. Son nom lui-même, Coët-Quidan, renverrait à l'épopée des premiers chrétiens d'Armorique.

 

Le camp militaire de Coëtquidan, enclave des ténèbres

Près d'un siècle après les événements sanglants qui virent s'opposer les "Lumières" aux "Ténèbres de la Superstition", on voulut frapper au coeur : « Vers 1880, à la suite de démarches faites par le comte de la Monneraye, sénateur du Morbihan, et par M. de la Foye, châtelain du Tertre, en Guer, et alors chef d’escadron d’artillerie, le ministre de la Guerre créa un camp et un champ de tir d’artillerie dans les landes de Coëtquidan [dans le Porhoët, entre Algam et Beignon]. Ce camp a été considérablement agrandi en 1910 et 1911 et on a exproprié et détruit le château de Coetloc’h (Bois-du-Loup) et beaucoup de villages et de fermes, en Beignon, Campénéac, Augan, Porcaro et Guer (…): expropriation brutale et sauvage de cinq mille hectares de terrains, qui aura coûté plus de cinquante millions. On a détruit les maisons, abattu les bois et les pommiers, transformé en terre inculte cet immense territoire, défriché il y a mille ans et mis en culture par les moines. L’extrême civilisation ramène à la barbarie.» ("Paimpont" – Marquis de Bellevue 1911) C'est sur les mêmes terres de Coetloc'h, mentionnées plus haut, que le souverain de Bretagne, Nominoë, aurait réuni un synode, le 6 Mai 848, et que l'Eglise de Bretagne aurait statué sur la création de  l'archevêché de Dol, pour contrer les empiètements de la métropole de Tours. On place parfois Coetloc'h en Saint-Congard, où se trouve le lieu-dit de Coët-leu (Aula Coetlouh).

 

Kidan, compagnon de Joseph d'Arimathie

Le camp de Coëtquidan recouvre une partie du Porhoët, Porhoët qui avait sans doute gardé dans ses forêts la plus grande mémoire du pays de Saint-Malo et, pour une bonne part, celle de Bretagne, particulièrement la mémoire des fondations et des légendes. Le nom de Kidan, qui compose le nom de l’ancien lieu-dit de Coëtquidan, serait celui d’un compagnon de Joseph d’Arimathie, venu sur l’ile de Bretagne et passé en Armorique. Ce même Kidan est évoqué par le marquis de Bellevue sous la forme « Cedon », qui aurait « évangélisé la contrée de Rennes », où il faudrait voir une partie du futur évêché de Saint-Malo et la forêt à laquelle Cédon / Kidan aurait laissé son nom. Dès lors, l’ennemi ne s’y serait pas pris autrement pour anéantir cette partie de la forêt armoricaine gardienne sous ses frondaisons de tant de souvenirs si lourds de sens et tellement chargés de la lumière des jours glorieux. L'apocalypse de Coëtquidan est à l'image de la Bretagne.

On se souviendra aussi que « Coëtquidan » fut aussi le théâtre de la fameuse bataille de Beignon, le 3 Mai 1794, où la troupe républicaine fut complètement défaite par les Chouans du pays de Rennes et quelques rescapés vendéens. Or, une grande partie du territoire de Beignon compte parmi les terres spoliées par l’État français pour la création du camp militaire: ce forfait ne constituerait en somme qu’une revanche de l’adversaire.

Une chose que le camp militaire n'a pu enlever au pays est la pierre de schiste qui affleure partout entre Campénéac et Plélan et colore les maisons de pourpre, jusqu'aux quartiers ouvriers de Rennes (du XIXe siècle, dont on se demande justement s'ils n'ont pas été fournis par les destructions de la forêt malouine). Et cette couleur exceptionnelle ne provient-elle pas du Saint-Graal quelque part enfoui au pied d'un chêne?

*

 

 

 

 

Concoret, évêché de Saint-Malo 

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chapelle-du-Bois-du-Loup-IVDruez

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Augan: Chapelle de Coëtloch (Bois-du-Loup), disparue

12 juillet 2021

Hiraezh d'ar vammvro

 

François-René_de_Chateaubriand_by_Anne-Louis_Girodet_de_Roucy_Trioson

 

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 Un souvenir de Chateaubriand

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François René de Chateaubriand passa une partie de son enfance à Saint-Malo intramuros. Voici une vivante évocation du Saint-Malo religieux, dans son livre « Mémoires d’Outre-tombe ».

 

« Durant les jours de fête que je viens de rappeler,
j'étais conduit en station avec mes sœurs aux divers
sanctuaires de la ville, à la chapelle de Saint-Aaron,
au couvent de la Victoire; mon oreille était frappée
de la douce voix de quelques femmes invisibles :
l'harmonie de leurs cantiques se mêlait aux mugisse-
ments des flots. Lorsque, dans l'hiver, à l'heure du
salut, la cathédrale se remplissait de la foule; que de
vieux matelots à genoux, de jeunes femmes et des
enfants lisaient, avec de petites bougies, dans leurs
Heures; que la multitude, au moment de la bénédic-
tion, répétait en chœur le Tantum ergo; que, dans
l'intervalle de ces chants, les rafales de Noël frôlaient
les vitraux de la cathédrale, ébranlaient les voûtes de
cette nef que fit résonner la mâle poitrine de Jacques
Cartier et de Duguay-Trouin, j'éprouvais un sentiment
extraordinaire de religion. Je n'avais pas besoin que
la Villeneuve me dît de joindre les mains pour invo-
quer Dieu par tous les noms que ma mère m avait
appris; je voyais les cieux ouverts, les anges offrant
notre encens et nos vœux; je courbais mon front : il
n'était point encore chargé de ces ennuis qui pèsent
si horriblement sur nous, qu'on est tenté de ne plus
relever la tête lorsqu'on l'a inclinée au pied des autels.

Tel marin, au sortir de ces pompes, s'embarquait
tout fortifié contre la nuit, tandis que tel autre ren-
trait au port en se dirigeant sur le dôme éclairé de
l’église : ainsi la religion et les périls étaient conti-
nuellement en présence, et leurs images se présen-
taient inséparables a ma pensée. A peine étais-je né,
que j'ouïs parler de mourir : le soir, un homme allait
avec une sonnette de rue en rue, avertissant les chré-
tiens de prier pour un de leurs frères décédé. Presque
tous les ans, des vaisseaux se perdaient sous mes
yeux, et, lorsque je m'ébattais le long des grèves, la
mer roulait à mes pieds les cadavres d'hommes étran-
gers, expirés loin de leur patrie. Madame de Chateau-
briand me disait, comme sainte Monique disait à son
fils : Nihil longe est a Deo : « Rien n'est loin de Dieu ».
On avait confié mon éducalion à la Providence : elle
ne m'épargnait pas les leçons."



 

 

 

 

 

Cathédrale de Saint-Malo

1 juillet 2021

Sant Lewenog

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* Sant Lewenog *


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Photo1102

An anv gall "Lunaire" pe "Léonor" a hañval dont eus ar brezhoneg, hag ar stumm "Laouenog" a glodfe gant ar yezh a hiziv, pe "Léhuineg" evit ar gwenedeg. Etre an daou stumm-se, kinnigañ a rajemp "Lewenog".

Sant Lewenog a voe unan eus ar sent pouezhusañ evit eskopti Sant-Mac'hloù.

 

Saint Lunaire est l'un des saints les plus importants de l'évêché de Saint-Malo, où nombre de sanctuaires lui sont dédiés. Il aborda avec d'autres moines bretons près de Saint-Malo, vers la pointe du Décollé, où sur les restes d'un ancien sanctuaire il bâtit le monastère d'où naquit la paroisse de Saint-Lunaire, ancienne trêve de Pleurtuit et jadis appelée Pontual, du nom du frère de st Lunaire, Tudual, celui qui fonda le monastère de Tréguier. C'est d'ailleurs près de Tréguier que se trouve le sanctuaire dédié à leur mère, sainte Coupaia, reine de Domnonée. La grand-mère de saint Lunaire se nomme ste Lanwenn, soeur de Riwall, venu en Armorique vers 512, qui y assit le nouveau royaume de Domnonée  et donna des terres à saint Brieuc pour son monastère sur le Gouët.

Comme nombre de fils de prince, il fut éduqué au monastère, celui de saint Ildut, où il eut pour camarades les futurs saints Pol-Aurélien, Gildas, Samson, Magloire...

On fixe généralement la fête de saint Lunaire au 1er Juillet, mais on le trouve aussi au 7 Juillet, selon le Sanctorale Macloviense (Offices propres du Diocèse de St-Malo). Une autre date se trouve au 13 Octobre, pour commémorer la translation des reliques du saint. Il y a encore d'autres dates selon les évếchés: le 16 Février pour Dol, le 3 Février pour Coutances.

Saint Lunaire est prié pour les maux oculaires.

 

 


Tiegezh

Tad : Hoel I (pe Haelog pe Hoelog), roue Devnon (Domnonea), hag anvet war ar seblant ivez Jonas pe Yonas,  a vije bet tad-kuñv da s. Juzikael : neuze e vije st Lunaer un eontr kozh da roue Juzikael.
Pa zegouezas ar "Frizoned" e 509 en Aremorika, tec’het en dije Hoel war enez Breizh ; eno e vije ganet Lunaer. Da vare-se e oa ar mor evit ar Vretoned un doare kanol a zispartie enez Breizh eus Aremorika (Breizh-Vihan), ha rouantelezh Devnon ivez, a oa a-c'haoliad war mor Vreizh. El lodenn aremorikel eus Devnon en em stalient ar Vretoned abaoe ouzhpenn ur c’hantved, karget ma oant bet en amzerioù kentañ da wareziñ aodoù ar c’hevandir hag diwezhatoc’h evit tec’hout diouzh ar brezel, bosenn  ha Saozon.
Mamm : "Alma Pompa", pe Koupaia, tiernez a zDevnon. Mamm sz Koupaia a zo santez Lanwenn (Loeva), gwreg da Euzeb pe "Riothamus" (g. wd 435). E-barzh ar gouelec’h e kaver anv Lanwenn evit an 29 a viz Here : « tiernez Breizh (…) A-raok an dispac’h gall e oa e relegoù e Senlis, e-lec’h ma vez c’hoazh hiziv dalc’het soñj anezhi. » Merc'h vihan Deroc'h ha c'hoar Riwal Meur Marzhoù a zDevnon.


Ganet e vije sant Lewenog e "Pembrokeshire" (mervent Kembre) hervez La Borderie.
Pa oa pemp bloaz e voe kaset da Lanildud : eno e vevas hiviziken gant e vreur Tudual ha tud santel all evel Pol, Samzun, Malor, Gweltaz…

Urzhiet e voe eskob gant Dubrig (=eskob Caerleon).


« Il y avait alors, en Bretagne, bien des évêques dont le diocèse « ne consistait qu’en un monastère (mais un monastère qui essaimait en ermitages, chapelles, prieurés à des kilomètres à la ronde, zone d’influence qui finira par être christallisée sous la forme des évêchés-territoires, à l’époque de Nominoe (IXe siècle et bien plus tard encore). Lunaire semble avoir été de ce nombre » (La Borderie). « Il n’avait point de siège particulier, et, sans « l’obliger de sortir de son monastère, on lui conféra la dignité d’évêque « pour le bien spirituel des peuples voisins; ce qui semble avoir été fort « ordinaire à la nation bretonne » (Trévaux)


Ledav


« Ils montèrent sur une vingtaine de barques : « des femmes, des enfants, « des guerriers reconnaissables à leurs vêtements de couleur pourpre, des « pâtres avec leurs sayons de peaux de chêvres se mêlaient à des moines « au front rasé » (de la Borderie) selon le rite monastique breton et vêtus de la tunique de laine blanche ou grise et de la coule de peau rougeâtre.
« Et bientôt, sur les flots de l’Océan Britannique (…), ces barques « tendaient leurs voiles, comme des ailes d’oiseaux, au vent qui les « poussait sans violence, vers la côte Nord de la péninsule armoricaine ». (de la Borderie ».



Ar Beg Dibeg

 

Le Décollé


« Bientôt, devant elles, les rivages de l’Armorique dessinèrent leurs contours aux vives arêtes, aux formes nettement accentuées. A gauche, c’était le vaste rocher d’Aaron encore désert, le fleuve de la Rance qui se pert au loin dans les terres ; entre le fleuve et le rocher, la cité d’Alet dressée sur son promontoire étalant avec orgueil sa ceinture murale, ses tours aux cordons de briques et son port rempli de vaisseaux. Sur la droite, au delà de la Rance, vers l’Ouest, les émigrants contemplaient de leurs barques avec admiration cette côte pittoresque, découpée en festons capricieux dont les dents formées de hautes pointes de rochers, enserrent des baies tranquilles bordées de sables d’or.
« Au-dessus de ces baies et de ces roches, en place des riches cultures et des riantes habitations, qu’on y voit de nos jours, partout se dressait, brillante sous le soleil, une épaisse forêt, haute et majestueuse, couronne du rivage, mais témoin irrécusable des pertes subies en ces rivages par la civilisation.
« On était alors au VIe siècle. L’Empire romain, après avoir longuement pressuré la région armoricaine, l’avait, depuis plus d’un siècle, abandonnée sans défense aux pirates du Nord, dont les cruautés et les ravages, succédant aux extorsions du fisc impérial, eurent bientôt créé le désert sur ces côtes, et contraint les derniers habitants à chercher dans l’intérieur des refuges mieux abrités.
« Quand la flotille fut, comme nous l’avons dit, en vue d’Alet, Lunaire ordonna de laisser la ville à gauche et de gouverner vers cette côte déserte, vers cette rive profondément déchiquetée, que dominait la grande forêt silencieuse.
« Le pilote se dirigea vers la pointe la plus avancée en mer : longue et haute muraille de roches abruptes, dont l’extrémité nord, relevée en pyramide et tranchée d’un coup de sabre gigantesque, se trouve séparée du reste par une fissure profonde où la vague s’engouffre et qui a valu à ce promontoire le nom de pointe du Décollé. (Beg Dibeg)
« Ce rempart indestructible protège, contre les vents d’Ouest, une jolie baie, ceinte d’une grève douce et brillante, où vient s’emboucher un petit ruisseau, dans lequel la mer remontait alors sans obstacle entre les grands arbres de la forêt. » De la Borderie



Pontual: ar c'hentañ nevedan

« Va sur le point le plus élevé de ce territoire et là, sonne ta cloche : aussi loin qu’on l’entendra, la terre sera tienne ».


Le territoire où aborda Lunaire devint la trêve de Pontual (dans la paroisse de Pleurtuit), du nom de son frère Tudual: nom qui est resté attaché, jusqu’à la Révolution, à la Seigneurie et à la paroisse de St-Lunaire de Pontual, et jusqu’à nos jours, à la forêt et aux vieux bâtiments d’une ferme.

« Mais hélas ! ses compagnons, dans la tempête, avaient jeté à la mer, pour alléger le navire, avec les bagages, son autel portatif, c’est-à-dire la pierre sacrée dont il se servait, dans ses voyages, pour célébrer la messe ». Lunaire se désolait, quand « il vit vers lui deux colombes plus blanches que la neige, venant de la mer et tenant, entre leurs pattes, son autel qu’elles posèrent à ses pieds ». Au XVIIIe siècle, « le trésor de la paroisse conservait encore cette pierre sacrée, et, pendant tout le Moyen-Age, on crut qu’un faux serment, fait sur cette relique, entraînait dans l’année même la mort du jureur ».



Aremorika zistro ha garv


« La première prière de notre évêque, après son débarquement, fut de demander à Dieu d’empêcher, lui et ses  moines, de mourir de faim : « Je vous supplie, Seigneur Jésus, de conforter le cœur de mes frères et de les soutenir contre la misère qui nous presse sur cette terre inconnue. »
Un jour, étant à prier ds un coin de la forêt, il vit se poser, près de lui, un petit oiseau, tenant au bec le reste d’un épi de blé (…) Il y avait donc, sous ces bois sauvages, un sol où le blé pouvait croître, un lieu où il croissait encore (…) Une clairière où s’était conservé, en se resemant lui-même, un petit champ de froment, dernier reste d’une riche culture depuis longtemps disparue avec les cultivateurs.
« (…) Ce fut un rude labeur. Aussi, après quatre semaines, les défricheurs n’en pouvaient plus. Perdant courage, ils supplièrent Lunaire de les conduire vers une autre plage moins rétive, où il fût moins dur de gagner sa vie. Mais le maître inflexible : « Ceci est une tentaiton du diable. Prenez courage et fortifiez-vous en Dieu ».
Ces malheureux obéirent et, pour prix de leur constance, peu de temps après, un beau matin, allant à l’ouvrage, ils virent la forêt entière tombée dans la mer et flottant sur l’eau (…) Divisée en îlots arborescents, elle nageait sur la mer, dit la vie de notre Saint (La Borderie), comme une troupe de canards ou d’oisons.

 

Ar c'hirvi


« (…) Privés de bêtes de trait ou de somme, les moines devaient tout faire de leurs mains, avec des bêches, des pioches ou autres outils très insuffisants: travail écrasant ! Une seconde fois, ils perdirent courage et comme leur première requête à leur abbé n’avait pas réussi, cette fois, ils résolurent de se sauver pendant la nuit et de le laisser seul en tête à tête avec son infernal défrichement. Lunaire eut vent du complot : doucement il réconforta ses moines ; puis chercha le remède où il était, dans les forêts voisines, où, depuis la disparition de l’homme, les animaux domestiques, ses aides naturels, étaient retournés et devenus à demi sauvages. Il y rencontra treize cerfs. »
La vie de Saint Lunaire veut voir dans ces animaux étonnants des cerfs de taille colossale et racontre même que, de la peau du treizième, éventré par ses congénères, l’Abbé fabriqua les rênes et les traits dont ils furent attelés eux-mêmes.


An abostol

 

« L’émigration bretonne, continuant sans trève, repeupla ces solitudes ».

Dans tout le pays, sur lequel régnait la cité gallo-romaine d’Aleth, centre d’un commerce prospère et aussi école « d’un paganisme étrange et composite, mélange du culte druidique et du polythéisme latin, Lunaire propagea l’Evangile ».


« Il semble (…) qu’il ait parcouru les campagnes riveraines de la Rance, du Meu et de l’Arguenon» :


Poudouvr : Pontual, Plouer (Pehou), Le Quiou, La Chapelle-Blanche (« sur la ligne de partage des eaux de la Rance et du Meu »), Komborn (Combourg), Begerel
Porhoët : St-Launeuc, Loskoed, Talenseg, Morzhell, Minieg-Porc’hoed,
Dol : Minieg-Morvan, Plerger, Hirel, Pleudihen (Mordreuc)
Penthièvre : Sant-Lormel
Roazhon (Rennes) : Andolieg (Andouillé)



An afer Konomor


Wd 540, ar roue Iona a voe lazhet gt Konomor, hag hemañ a zimezas e intanvez (kv kastell "Montafilan"). Lunaer a fellas dezhañ gwareziñ Judual, mab da intanvez Iona, diouzh Konomor, a zeuas gant ur strollad bras eus e lu da weladenniñ st Lunaer en e manati, « d’an trede eur »: pa erruas, edo sant Lunaer o kerzhout e penn ar manati a sell ouzh an aod hag hemañ neuze a gelaouas Konomor e oa aet kuit Judual, o tiskouezh gant e viz ur vag a bell ha lark kaer he lienn-gouel o vont a-dizh diouzh ar Beg Dibeg (Pointe du Décollé). Konomor, leun a fulor, a roas ur flac'had da Lunaer, met ne c’hellas ket aze mirout ouzh Judual da dizhout aodoù Galia et mont betek lez roue Frañs Childeberzh da chom dindan e warez..



An daou zen dall


Diskennas a reas Lunaer d’e lec’h annez anvez Pehou (e Plouer), hag eno treiziñ ar Renk, douarañ e Mordreg (Mordreuc, Pleudihen) ; aze e kejas gant daou zen dall : unan a voe pareet e zaou lagad, an eil ul lagad nemetken, rak ne oa ket bet badezet na kenteliet diwar-benn an traoù dibar a sell ouzh ar Feiz ; goude bezañ bet maget neuze gant kelenadurezh st Lunaer en em zigoras e eil lagad dezhañ.



Kloc'h ha mein


Le prince dit à saint Lunaire: « Va sur le point le plus élevé de ce territoire et là, sonne ta cloche : aussi loin qu’on l’entendra, la terre sera tienne ».

Alors il "parcourt les campagnes et interroge les habitants : les uns loyalement avouent avoir entendu la cloche, les autres le nient avec impiété. Aux terres des premiers il donne une miraculeuse fécondité ; la stérilité et la misère seront le partage des seconds. Ce châtiment dura trois ans (…)


« Il jetait son manteau sur de longues pierres couchées, qui se levaient sur son ordre, se mettaient en marche et s’arrêtaient où se terminaient les terres monastiques. La tradition a conservé à ces pierres le nom de « perrons de Saint Lunaire »: « Il mit des bornes à sa paroisse, (écrivait en 1689 Thomas Le Maîstre, recteur de Saint-Lunaire), qui se voient encore aujourd’hui et se nomment perrons, c’est-à-dire grosses et hautes pierres, qui déterminent la paroisse de ses circonvoisines… Même il y en a une du côté de Saint-Briac, élevée de deux ou trois pieds, large d’un pied, au bas de laquelle est un rond, en terre, de trois quarts de pied de diamètre, où l’on n’a jamais vu herbe, parce que, croit-on, le saint a célébré la messe sur cette pierre et c’était le lieu où il faisoit la génuflexion ». Que de traditions semblables ont disparu de Bretagne! Mais on montre, encore aujourd’hui, quatre « perrons de Saint Lunaire ». Si on se dirige vers Pleurtuit, à 4 km de St-Lunaire, on trouve, au bord de la route, une pierre haute de 75 cm, large de 35, épaisse de 30, qui, au ras du sol, prolonge cette épaisseur de 35 cm et prend ainsi la forme exacte qui lui a valu son nom : « le prie-Dieu de st Lunaire ».



Marv sant Lewenog


War-dro ar bloaz 580. Goude bezañ strollet e venec’h tro-dro dezhañ e varvas sant Lewenog da zeiz kala-gouere, da lavarout eo da geñver al loar-nevez, o vezañ ma reomp stad aze eus ster ar gêr « kala », hag a dalv deroù, deizh kentañ al loar nevez.
Klevout a raed kantikoù an aeled, o rentañ grasoù d’an Aotroù, en ur ganañ : « Ra vo benniget an Aotroù a deurvezas degemer ene hon pastor, e-mesk ar meuleudioù neñvel. Rak e ouzomp disamzivin e vo evidomp un hanterour dibar da gichen an Aotroù a zo dleet an enor, ar gloar, ar c’halloud hag ar veli a gantvedoù da gantvedoù ».

 


An deoliezh da sant Lewenog

La dévotion à saint Lunaire

    • Eskopti Aled-Sant-Mac’hlow

Evêché de Saint Malo

. Pontual (Saint-Lunaire), er Poudouvr
Betek 1884 e voe kehelet sant Lunaer en e iliz kozh ha tro-dro d’e vaen-bez ha d’e feunteun (er gwalarn) ; « mein sant Lunaer » (perrons) ; « la fête du Patron est célébrée solennellement à Saint-Lunaire . Jadis, elle commençait par les premières vêpres, le 30 juin. A l’issue des vêpres on faisait une procession ; au temps de l’ancienne église, elle sortait de celle-ci, montait le Tertre-aux-Scènes sur la route de Saint-Briac et revenait par le chemin du village de la Mare (…). Le lendemain, premier juillet, avait lieu à 8 heures la messe dite « des pélerins ». Certaines années, ceux-ci furent si nombreux, que, disent les anciens, bon nombre devaient coucher dans l’église. La fête solennelle a lieu le 1er Dimanche de Juillet. A la grand’messe, qui est celle des confesseurs pontifes, secundo loco, panégyrique du Saint. après les vêpres, la procession, composée, outre le clergé, d’enfants costumés en marins, portant les reliques et des étendards multicolorres, se rend à l’ancienne église. Celle-ci a été richement décorée. Des marches du vieil autel, sous la statuelle antique, devant le tombeau, le prédicateur prend de nouveau la parole. Puis, après le chant d’une cantate en l’honneur de saint Lunaire, le cortège rentre à l’église nouvelle où est doné le Salut du T.-S. Sacrement. La fête ressemble, on le voit, à un vrai pardon breton. Aussi les rues du vieux bourg sont-elles encombrée de boutiques, de barraques et de chevaux de bois, dont les orchestres dont respectueusement silence au passage de la procession : c’est l’assemblée profane qui suit, le lendemain la foire traditionnelle.


. Plouer, Poudouvr
Beg ar Pehou – promontoire du Péhou (« Chêne vert ») : « Sur le flanc sud-est du coteau, se voient, affleurant le sol, les fondations de la chapelle de Saint-Lunaire. Au-dessous jaillit parmi des broussailles chevelues la fontaine miraculeuse, dont les eaux traversent sous un poncel, le mur de clôture, puis se jettent dans l’anse voisine, qui porte le nom de notre saint. Partout, sur la grève, aux villages de Plumazon et de la Moignerais apparaissent les vestiges d’antiques constructions, station romaine, fortifications ruinées, monastère de Lunaire. Sur la colline, est la moulin aux Moines. En face, sur l’autre rive, en la paroisse de Pleudihen, se trouve le village de Mordreuc où Lunaire, venant du Pehou (…) guérit deux aveugles (diwar vont da pBariz)
Ar chapel a gouezhas en he boul er XVIIIet kd : « le bénitier fut porté au village voisn, où on le conserve encore » Pezhioù all anezhi a voe implijet da sevel « chapelle des Vaux », lec’h m’edo ur « buste de St Lunaire encadré dans une miniature en bois (…) On y donne les évangiles le jour de saint Lunaire. Procession.

Iliz Plouer : na lidkerzh na ouel ken !

. Kilioù / Le Quiou (Poudouvr, deaniez Begerel)
Registre de la paroisse : « Il y avait autrefois un grand pèlerinage, le jour Saint-Lunaire, à l’église du Quiou. C’était pour le mal d’yeux queles fidèles venaient de tous côtés se reconmmander  la protection de notre Saint Patron ». Après la Révolution, seule s’assemblée profane subsista, mais ses abus la firent combattre par les recteurs et elle tomba en désuétude : « aujourd’hui il n’en est plus question, seulement il vient encore quelques fidèles qui sont évangélisés devant la statue du Saint » (gant ar vazh-abad hag o vennigañ gant daou viz). La fête de saint Lunaire, second patron de la paroisse, se confond, le premier dimanche de juillet, avec celle de la Visitation. Le sermon, sur ce mystère de la Vierge Marie, patronne principale, alterne avec la panégyrique de l’Evêque.

. Gwenevedan (La Chapelle Blanche)
gwazig Sant Lunaer, e-harz ar roz ha gweñvet gant dour ar feunteun. Relegoù. Indulgence plénière Innocent XI, adnevesaet bant Leon XIII. Gouel da zeiz kentañ a viz Gouere : relegoù lakaet da vezañ gwelet, hag a-hed an eizved. Goude Gousperoù, lidkerzh gant ar relegoù, diskenn betek traoñ an draonienn hag ar feunteun arnevez ; panégyrique, gwalc’hiñ al lagadoù.

.Leskoed-Tremorel (Loscouet)

Le Loscouet était une trève de Trémorel, au doyenné de Lanouée, et semble résulter, comme son nom brittonique l’indique (lez-koed =  orée de la forêt), des défrichements autour du monastère de Gaël.
Lescoet se trouve sur la rivière du Meu, rivière parallèle à la Rance. Sur une gorge est jeté le « Pont de Saint-Lunaire », sous lequel « jaillit la fontaine qui s’écoule dans une piscine creusée plus bas ». La statue qui s’y trouvait était, le jour du pardon, exposée sur un trône dans le « petit bois qui ombrage le déversoir ». Après Vèpres, on portait en procession les reliques de saint Lunaire. Une foire se tenait le lendemain.
L’ancienne église, qui a disparu, remontait au XIIe siècle (fonts baptismaux portant la date de 1158) pour une partie.

.Talensac

Talensac est aussi sur la rivière du Meu. La tradition veut que Judicaël et Erispoë, rois de Bretagne, y auraient établi leur résidence du VIIème et au IXème siècle. Saint Lunaire en est le patron secondaire, après saint Méen. Il est vrai que dans ce coin du Porhoet, qui jouxte le Poudouvr, on honorait peut-être autant saint Lunaire que saint Méen. Dans l’église qu’on a incendiée en 1872, on venait prier pour les yeux à la statue du saint. Il y a aussi une fontaine dédiée à saint Lunaire : « elle se trouve à 600 m au Sud-ouest du bourg, près du hameau du Ménage, au carrefour de chemins creux et ombreux », chemins qui au cours des années 1960-70, ont dû être démolis par les bulldozers, emportant aussi peut-être la fontaine, comme cela s’est souvent produit en Bretagne pendant cette période de folie. Cette fontaine est décrite par  l’abbé J. Mathurin comme « un trou profond de 1 mètre 50, entouré de pierres et recouvert d’une large dalle sous laquelle s’étend la nappe d’eau à plus de 1 mètre 75 de la margelle.
Quand on continue suivre le Meu, on arrive à Mordelles, où saint Lunaire était aussi honoré. Talensac est de l’ancien évêché de Saint-Malo, tandis que Mordelles est de celui de Rennes.

.Miniac-sous-Bécherel

On nomme aujourd’hui l’ancienne paroisse de Miniac par rapport à Bécherel, mais il faut savoir que Miniac relève anciennement d’un autre doyenné que celui de Bécherel, et même d’un autre archidiaconé que celui de Dinan : Miniac relevait du doyénne de Montfort et de l’archidiaconé du Porhoet.
Saint Lunaire est le second patron de Miniac, après saint Pierre. On le vénérait en sa statue dans la chapelle côté sud de l’église. La fontaine est  « à 200 m de l’église vers le sud-ouest, au carrefour de trois sentiers (…), creusée dans un haut talus ». C’est un endroit aujourd’hui entretenu, entouré de fleurs et de verdure.
Ici encore, le pardon avait lieu le premier dimanche de juileet. Il y avait foule et certains arrivaient de très loin, si bien qu’on dut instituer le « guet de saint Lunaire », formé par quelques notables choisis par le Général du conseil d’administration de la paroisse. Une écuellée à la fontaine coûtait deux liards. On commençait à faire affluer les pélerins à deux heures du matin ! Nombre d’entre eux recouvraient la vue. Avec l’argent recuilli, on entretenait la fontaine, l’autel à l’église et on achetait des lumières pour la guet. Le pardon fut supprimé au XIXe siècle, mais les pélerins continuèrent d’affluer de façon privée. Le porteur de la statue la plaçait au-dessus de la fontaine et trempait le pied de la croix dans l’eau « et se gardait bien de l’essuyer ».

. Komborn (Combourg)

Autrefois, dans l’ancienne église de Komborn qui a disparu, existait un autel dédié à Saint-Lunaire. Une fenêtre de la nouvelle église montre le saint qui bénit l’un des cerfs laboureurs. Saint Lunaire était très populaire à Komborn, et sa fontaine très fréquentée (cf Guillotin de Corson : Pouillé historique t.VI) : elle se trouve au bord de la Rue Pavée, au lieu appelé « Piquette ». Une vieille mendiante y priait pour qui la payait de quelques sous. Une foire Saint-Lunaire avait lieu le  premier lundi de juillet.

. Ploubêr-Paoualet (Saint-Père-Marc-en-Poulet)

Il y avait autrefois une chapelle Saint-Lunaire et une fontaine à laquelle se rendaient les pélerins atteints d’une maladie des yeux. Une statue de saint Lunaire se trouvait dans l’église

. Saint-Launeuc (diocèse de Dol)
Autour de la l’ancienne église, le cimetière possédait la fontaine de saint Lunaire, à son angle nord-ouest. Le 1er Dimanche de Septembre, on exposait, à la première messe, les reliques du saint dont on racontait la vie ; le soir avait lieu la procession.

Evêché de Dol

. Pleudihen

Les Bénédictins du Tronchet avaient une hôtellerie : Saint-Lunaire de l’Hostellerie.
Sur la route de Dinan à Dol se trouve le lieu dit « Lourmel ». Or on sait que l’ancienne paroisse de Saint-Lourmel, près Plancoêt, était dédiée à saint-Lunaire.
C’est à Mordreuc en tout cas, sur les bords de la Rance, que saint Lunaire guérit deux aveugles, après avoir traversé l’estuaire depuis Pehou en Plouer. La chapelle de Mordreuc est dédiée à sainte Ouine, où se trouvait une statue de saint Lunaire.

. Plerguer

Sur la route de Dol à Dinan se trouvait le prieuré de la Barre, qui dépendait de l’abbaye bénédictine ND du Tronchet. « La chapelle priorale était un peu à gauche de la route du côté de Beaufort ». La statue de saint Lunaire fut brûlée en 1881 par une fille de mauvaise vie et qui perdit la vue immédiatement après avoir commis son forfait. La fontaine existait encore en 1913, mais déjà en mauvais état.

. Baguer-Morvan

Une chapelle, avec saint Lunaire pour patron secondaire, existait au manoir de Launay Blot : est-elle toujours debout ? On note en 1913 qu’elle « occupe l’angle Sud-Est d’un vaste jardin bordé de douves, qui s’étend devant le logis ». Elle fut dédicacée le 18 Novembre 1663 par Mathieu Thoreau, évêque de Dol.

. Hirel

Une chapelle Saint-Lunaire existait sur le bord de la digue du marais, à l’Ouest du bourg, près du village de la Quesnière. « Cette chapelle fut interdite en 1725, et le culte du Saint transféré à l’église paroissiale ». La chapelle fut réouverte en 1753. Au début du XXe siècle, on marquait encore la fête mais « sans office spécial, le 1er dimanche de Juillet ; la procession ne se fait plus. Cependant, ce jour-là, et même à d’autres jours de l’année, les personnes atteintes de maux d’yeux viennent recevoir les Evangiles ». Mlle Gauvin de Cancale, casiment aveugle, recouvrit la vue à l’occasion de son pèlerinage à saint Lunaire, à Hirel.

Eskopti Leon

ur chapel



Diocèse de Rennes

. Rennes

Une chapelle dédiée à saint Léonor se trouvait dans la cathédrale, qui fut détruite, indique Dom Lobineau.

. Mordelles

Fontaine Saint-Lunaire, qui « jaillit à 2 km au levant de la ville, à 1 km environ et au Nord de la rive droite du Meu, entre le village de Sermon et le village de la Haychois ». Les pélerins y venaient nombreux « dès la pointe du jour, dit-on, demander à la prière et aux ablutions pieuses la guérison de maux d’yeux ou de fièvres ». Aux Rogations, on se rendait à la chapelle en procession. « Aujourd’hui, hélas ! (1913) depuis quarante ans plus de procession, plus de suppliants ! La fontaine est encombrée d’herbes aquatiques et désertée par les pélerins ! » (Abbé Giboire).

. Andouillé

Statue à la chapelle de l’Assomption, au Nord d’Andouillé. Le 1er dimanche de Juillet, les pélerins venaient prier nombreux pour la guérison des maux d’yeux.

. Saint-Ouen-la-Rouerie

Le Pouillé dit que l’église « dédiée dès le XIe siècle à saint Ouen a pour seconds patrons S. Nicolas et S. Lunaire ». Mais nulle trace de dévotion.


Diocèse de Saint Brieuc

. Saint Brieuc

Saint Lunaire était le patron de la chapelle du Gouëdic

. Saint Lormel

Une relique de saint Lunaire est conservée là-bas. L’ancienne église paroissiale est située à un lieu différent du bourg où se trouve la nouvelle. C’est surtout dans cette vieille église qu’on honore saint Lunaire, sur les bords de l’Arguenon ; à l’intérieur même est un puits, au côté de l’épître, qui s’ouvrait autrefois au niveau du dallage. Le diocèse de Saint Brieuc n’avait pas ou plus d’office de St Lunaire, mais après vèpres, on portait le reliquaire en procession depuis la nouvelle, où avait lieu la messe du matin, jusqu’à l’ancienne église où était donné le Salut  et les Evangiles, et où l’on venait puiser l’eau du puits. Les reliques restaient exposées pendant tout l’octave.
Une indulgence plénière a été accordée par le Pape alexandre VII, le 14 Novembre 1665, « à tous les fidèles chrétiens qui visiteront, tous les ans, au premier jour de Juillet, l’église paroissiale de Saint-Lormel.

. Plenée-Jugon

Nous sommes ici près de la source de la rivière Arguenon. « Cette paroisse honore st Lunaire de temps immémorial ; sa statue orne l’église et fa fête est célébrée le lendemain de la fête du patron, st Pierre, par une messe solennele suivie du Salut. La fontaine est au centre du bourg.

. Saint-Cast

Une statue de saint Lunaire se trouvait autrefois dans l’église et on le fêtait le même jour que Saint Cast (16 mai)

. chapelle Saint-lunaire du Gouedic, réunie à la paroisse de Cesson en 1509

. Etables

Chapelle Saint-Lunaire, disparue.

. Moncontour

« L’hôpital de cette ville a pour patron s. Léonard. Or, d’après M. le chanoine Daniel, curé-archiprêtre de S. Sauveur de Dinan, le S. Léonard honoré dans les hôpitaux ne serait point celui de Limoges mais bien S. Léonore ou Lunaire ». Fontaine « Saint Leonard ».


Diocèse de Treger

. Langoat

L’église est sous le patronage de la mère de saint Lunaire, sainte Coupaia (Alma Pompa), qui y fut inhumée. Au-dessus du tombeau, un reliquaire contient des os de st Lunaire avec d’autres de ses parents.
On substitua le nom de saint Brieuc à celui de saint Lunaire  sur une statue ancienne de l’église (autel latéral, disparue)

Gwerz sz Koupaia


Lunaer

30 mai 2021

Prisperiog

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L'ancienne paroisse de Pipriac est non loin de Redon, mais déjà dans l'évêché de Saint-Malo.
C'est un haut lieu de l'installation bretonne en Armorique, comme en témoigne le cartulaire de Redon.
 
Ses seigneurs portent un bâton du dais au couronnement ducal.
 
Au IXème siècle le territoire de Pipriac « Prispiriac plebs » formait une paroisse bretonne — un "plou", selon l'appellation en vogue à l'époque — gouvernée en 834 par un mactiern appelé Riwalt (Cartulaire de l'Abbaye de Redon, 98). Au siècle suivant le régime féodal s'établissant en Bretagne, ce plou donna naissance à une seigneurie possédée par les comtes de Rennes. L'un d'entre eux, Juhel Bérenger mort vers 910, gratifia son second fils nommé Martin de Rennes de la « chastellenie de Prispriac ».
 
Le 1er mai 834, le prêtre Worcomin, fils de Riwor, mû par un motif de piété commun à cette époque, donna aux moines de l'abbaye de Redon une partie de sa terre de Teillac, « partem de tegran Taellac » située au Nord et au-delà de la rivière, traversée par un chemin public et bornée par les terres d'Urgint et de Worgint. Le donateur y ajouta une masure sise dans le village même de Teillac et fit également don aux moines de ses habitants, Weiden et ses fils. Cette donation fut faite sur la terre même en question, près de Teillac, et en présence de plusieurs personnages distingués. Le même jour, Worcomin ajouta au don précédent la huitième partie de la ferme de Péron, « VIII partem virgade Peron », située dans la paroisse d'Anast (aujourd'hui Maure-de-Bretagne), et que son parrain Jarncolin lui avait donnée lorsqu'il reçut la tonsure cléricale. Worcomin donna donc cette terre en toute propriété aux religieux de Redon le 1er mai 834 ; l'acte en fut passé à Teillac, en Pipriac, « factum est hoc in plebe Prispriac in loco nuncupante Taellac » (Cartulaire de l'abbaye de Redon, 97, 99 et 168). De ces actes il faut conclure qu'au IXème siècle Pipriac était déjà une paroisse importante habitée par une population bretonne composée de nobles, de prêtres, de colons et de serfs. Les nobles étaient, en 834, Riwor, Riwohen, Hiawid, Haëlocan, Winoc, Worbri, Winnau, Wétenoc, etc. — Les prêtres se nommaient, à la même date, Worcomin, Riscun et Paschaël, et en 882 Atoère, Drewoion et Anauhoiarn. — Enfin, Weiden et ses enfants, donnés en même temps que leur demeure de Teillac, nous représentent les colons ou plutôt les serfs qui se trouvaient en 834 à Pipriac. Spirituellement, Pipriac dépendait déjà de l'évêché d'Aleth ou de Saint-Malo, puisque ses habitants reconnaissaient l'autorité d'Ermor, évêque d'Aleth ; temporellement, elle était en la même année 834 gouvernée par un mactiern ou chef de paroisse appelé Riwalt (Pouillé de Rennes).
Vers la fin de ce IXème siècle, une contestation s'éleva entre les moines de Redon, possesseurs de la paroisse de Langon, et quelques habitants de Pipriac, au sujet des limites de ces deux paroisses. L'affaire fut portée devant Alain-le-Grand, comte de Vannes, dont l'autorité remplaçait alors celle des anciens mactierns. Ce prince vint lui-même sur les lieux, écouta les raisons données par Cadwobri, Breselvobri et Wetenic, représentant les intérêts des habitants de Pipriac, et termina le différend (Cartulaire de l'abbaye de Redon, 38). A cette époque Pipriac était une très-grande paroisse, puisque, outre le territoire actuel de Saint-Ganton, sa trêve au moyen-âge, elle renfermait encore Teillac, village se trouvant aujourd'hui en Saint-Just. Le Cartulaire de Saint-Maur-sur-Loire nous dit aussi qu'en 843 la paroisse de Pipriac, « vicaria Prisperiaca » était limitrophe de celle de Maure. Pipriac s'étendait donc alors de Langon jusqu'à Maure (Maure-de-Bretagne). En 1152, saint Jean-de-la-Grille donna au Chapitre de Saint-Malo, qu'il venait d'établir, l'église de Pipriac et les chapelles en dépendant ; ce don fut confirmé en 1157 par le pape Adrien IV.
 
Pendant la période révolutionnaire, Rengervé, chef chouan, organise le recrutement pour les armées vendéennes. Les 25 et 27 janvier 1789, les paysans attaquent le bureau du procureur fiscal Théolohan dans le bourg, puis à La Gatinelais, et brûlent les papiers. Le 4 mars 1790, Pipriac est rattaché au district de Redon. Aucun prêtre n'ayant prêté serment, la commune devient un refuge d'insoumis et l'abbé Cottier est guillotiné. Le 9 août 1794, le courrier de Rennes est tué. Le chef chouan François Durand est pris en chasse et sa tête mise à prix à 3 000 livres par le commissaire de la République Rosy. Le maire Vauquelin, à ses dépens, défend les biens de ses concitoyens et empêche les réquisitions. L'école communale des garçons est créée en 1803, et celle des filles en 1847. En 1902, une école privée est installée à la Providence. Le 1er mars 1906, les gendarmes venus pour l'inventaire de la séparation de l'Église et de l'État sont repoussés. Le 4 mars, l'inventaire a lieu devant 3 000 personnes en armes, une batterie d'artilleurs à cheval et 50 gendarmes.
A Pipriac sont restées debout beaucoup de maisons anciennes.

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22 mars 2021

Manati sant Mac'hloù

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Lorsque qu'on aborde Saint-Malo, il faut contempler le site de loin, si l'on veut s'imaginer le monastère qui s'étendait à son sommet, où saint Malo et saint Aaron y menèrent la vie pénitente des moines; s'imaginer le silence des rues et des couvents, et entendre la chanson des cloches dans le vent. Est-ce que l'idée de départ ne vaut plus? Le sanctuaire est-il voué à l'oubli et à la vindicte d'un monde qui aurait changé?

L’intuition monastique que Bretagne et Irlande voulurent suivre, n'est que la réponse logique à la quête des terres celtiques. Elle leur vient d'un peuple en attente, attente qui reçut sa réponse quand les premières familles chrétiennes israëlites accostèrent dans leurs îles, aux temps apostoliques, et qui avaient hérité de la tradition érémitique essénienne, dont est issue sainte Anne: il y eut ainsi un mariage entre deux traditions. L'idéal monastique se confondra avec la tradition du Saint-Graal, le saint calice du Christ dans lequel se cache toute la Sagesse Divine et où se fond l'âme pélerine des Celtes.

En effet, la quête du Graal, comme l'idéal monastique, exige des conditions de vie intérieure rarement réunies. Les activités extérieures empêchent la contemplation qui serait nécessaire et détournent le désir. Il est tout près et on ne le voit pas. C’est le drame de l’aveuglement devant les réalités spirituelles. Dans le monachisme même, on sera tenté d'être plus attentif aux conditions matérielles de la recherche qu’à ses conditions spirituelles.

La Quête du Graal est une aventure avant tout spirituelle, elle exige l’intériorité, qui seule peut ouvrir la porte de la Jérusalem céleste où resplendit le Divin Calice. La perfection humano-divine se conquiert, non pas à coups de lance ou d'exploits, comme un trésor matériel, mais par une transformation radicale de l’esprit et du cœur, que Dieu seul peut opérer. Il faut aller plus loin que Lancelot, plus loin que Perceval, pour atteindre à la transparence de Galaad, vivante image de Jésus-Christ: dans le saint Calice qui lui dévoila ses secrets, Galaad vit la Gloire de Dieu et en mourut. Notons qu'en dernier lieu, c'est Dieu qui prend l'initiative pour se faire connaître: mariage entre la volonté humaine et l'élan Divin.

 

Aranmore - nevedan sant Brendan / oratoire de saint Brendan, en Irlande Le monachisme est le pragmatisme du christianisme. S'il culmine dans les monastères, il a vu, dans les iles celtiques, des clans entiers venir vivre à leur ombre, comme base de leur propre société. Il pénétra tout le christianisme, le monde alors n'était plus du siècle, le clergé lui-même, et à sa suite villes, villages et manoirs, tendaient à devenir un grand monastère: l'Europe n'était pas celle des marchands, ou s'il elle l'était en partie, le but était plus haut.

La destruction actuelle des campagnes n'est pas anodine, pas plus que le vacarme des communications démultipliées, la vitesse, la mécanisation... la vie d'autrefois s'attachait à la contemplation, à la lenteur, à la beauté de la nature et des oeuvres humaines, offrait l'écrin naturel dans lequel l'âme s'ouvre à la paix du coeur et à la justice. Si la guerre venait parfois troubler l'ordre, elle n'était que ponctuelle: aujourd'hui, elle est de tous les jours et faite de mille nuisances. La plus grave nuisance est celle d'un monde inhumain et la non connaissance de soi et du monde.

Le Dimanche de la Passion, on chante Iúdica me, Deus, et discérne causam meam de gente non sancta, dans le psaume 42: Jugez-moi, ô Dieu, et séparez ma cause de celle d’une nation qui n’est pas sainte.

 Originale

 

 

 

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Jozef Arimatea & Britannia - Britannia nova

adalek pajenn 28 eus e levr diwar-benn koad Pempont extrait du livre du Marquis de Bellevüe "Paimpont", page 28, daté de l'an 1911, écrit à Augan au château de la Touraille, évêché de Saint-Malo. "C'est à l'évangile apocryphe de Nicodème qu'est due l'introduction dans les traditions et les légendes armoricaines du mythe fameux du Saint-Graal.

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Sant Mac'hloù hag e vro
  • Ganet e voe sant Mac'hloù e Lankarvan ha desavet gant sant Brendan. Meur a vanati e savas e Breizh-Vihan. Saint Malo naquit au monastère de Llancarvan, en Bretagne. Elevé par saint Brendan, avec lui il participa à la fondation de la nouvelle Bretagne.
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